La destruction du vivant est bien avancée

En particulier depuis la mise sur le marché des néonicotinoïdes au début des années 1990, une nouvelle classe de pesticides (poisons neurotoxiques) hyper efficace mais non sélective, 75 % des effectifs d'insectes ont disparus dans nos contrées. 40 % des oiseaux ont disparus (60 % dans les zones agricoles). 90 % des vers de terre ont disparus des surfaces cultivées. Or comme ce sont ces vers de terre qui transforme la matière organique en sol fertile, cela signifie que la quasi-totalité des sols cultivés industriellement sont des substrats morts. Les végétaux n'y poussent qu'à coup d'intrants chimiques.

Il conviendrait donc plutôt de parler de génocide du vivant.

Si l'on ne considère que les mammifères, les animaux sauvages (terrestres et marins) ne représentent plus que 6% de la biomasse. Il ne restera bientôt plus sur terre que les humains, leur cheptel... et leurs prédateurs (virus, bactéries).

Autre exemple frappant : aujourd'hui en France, on peut considérer que nous n'avons plus accès à de l'eau potable. Que ce soit l'eau du robinet ou l'eau en bouteille, les dernières études ont mis en évidence des taux de métabolites (résidus de pesticides) et de polluants éternels (les PFAS notamment) qui présentent un danger pour la santé.

Le numérique contribue aussi à cette destruction

Le numérique nécessite de grandes quantités de ressources pour la fabrication des appareils (minerais, eau pure, plastiques issus de la pétrochimie, énergie), consomme de l'énergie pour son fonctionnement et produit beaucoup de déchets toxiques lors de la fabrication et de la destruction. De plus le numérique est responsable de 4 à 5 % des émissions de gaz à effet de serre (plus que le transport aérien), une proportion en constante augmentation.

Il est pourtant possible de limiter grandement cet impact en prolongeant la durée de vie des appareils grâce à des systèmes libres et en adoptant de bonnes pratiques. Lire les détails dans ce billet.

Les transferts de pouvoir par le numérique sont plus insidieux

Si vous pensez que la transformation numérique de notre société consiste simplement en ce que nous devront bientôt obligatoirement utiliser un appareil numérique pour effectuer nos démarches administratives ou payer notre place de parking (ce qui pourrait être contraignant pour certains d'entre nous) ou que nous pouvons désormais commander en ligne dans un immense catalogue de produits et être livré rapidement (ce qui peut être bien pratique pour d'autres), vous êtes loin du compte.

La marchandisation de l'humain

La logique capitaliste s'est emparée du domaine du numérique. Son omniprésence et sa puissance de calcul, ont permis l'exploitation d'une nouvelle source de profits : la donnée. On parle bien ici de données sur les comportements humains, captées en permanence à partir de capteurs que la plupart des gens portent sur eux (ordinateurs de poches ("smart"phones), montres connectées) ou possèdent chez eux (ordinateur, enceintes connectées, TV connectée, domotique, etc.) ou croisent dans la rue (caméras de surveillance) ou dans les commerces (capteurs Wi-Fi ou Bluetooth).

Il est possible de bloquer une bonne partie de ce recueil de données en installant sur votre ordiphone ("smart"phone) et dans vos navigateurs web un bloqueur de traqueurs et de publicités. Les ordinateurs ou ordiphones équipés d'un système libre ne transmettent pas de données à vote insu.

La connaissance c'est le pouvoir

Les algorithmes sont capables de traiter très rapidement des masses de données qui vont permettre tout d'abord de connaître chaque individu et de l'évaluer selon divers critères. L'évaluation permet de prendre des décisions concernant un individu. La connaissance fine permet ensuite de prédire les comportements, à la fois individuels et collectifs. Mais pour maximiser les profits, ou le contrôle des populations, il faut réduire l'incertitude liée à cette prédiction. Et finalement le plus efficace sera d'induire les comportements voulus. En ciblant chaque individu avec un message qui lui est adapté, en contrôlant les informations auxquelles il a accès, et en démultipliant ces effets sur des réseaux sociaux centralisés touchant des centaines de millions d'utilisateurs, il devient possible de manipuler les populations.

Cette nouvelle source de profit n'est pas marginale. Tout au contraire elle a amené les quelques entreprises dominantes du secteur au sommet de la puissance financière. Aujourd'hui 6 des 7 plus grandes capitalisations boursières du monde sont les GAFAMX (Apple, Microsoft, Google-Alphabet, Amazon, X-Tesla et Facebook-Meta).

Ainsi un numérique sous le contrôle d'une poignée d'entreprises (ou d'un état totalitaire) transforme les individus en consommateurs sous contrôle. L'individu, influencé en permanence au travers des objets connectés qu'il porte ou côtoie, perd son libre arbitre. Le pouvoir est ainsi transféré des personnes vers ces nouveaux oligopoles, plus puissants que des états. La démocratie est en danger.

Les gouvernements ne souhaitent pas démanteler ces géants de "la tech" car ils trouvent bien pratique d'avoir accès à toutes ces données centralisées (donc faciles d'accès) qui permettent la surveillance des populations, c'est à dire de s'assurer du statu-quo.

L'équipement des écoles et des écoliers par les appareils de Google, Apple et Microsoft témoigne de cette connivence.

Vous pouvez soutenir les associations de défense des droits numériques et de promotion des logiciels libres et des services éthiques, comme La Quadrature Du Net, l'April et Framasoft. Ainsi que sensibiliser et agir au travers d'associations de parents d'élèves.

Vers un capitalisme algorithmique ?

Les progrès de la dite "intelligence" artificielle pourraient mener à une gouvernance algorithmique où les décisions seraient prises par des machines, incapables par nature de prendre en compte le "facteur humain".

Nous serions alors dans un totalitarisme numérique, où chaque vie humaine serait dans les faits régie par des algorithmes conçus pour maximiser les profits et le pouvoir d'une poignée d'organisations dominantes. Cela pouvant tout à fait se faire en préservant l'apparence d'institutions démocratiques et d'une liberté individuelle.

Effets secondaires destructeurs

Pour maximiser leurs profits les géants du numérique ont conçus leurs applications pour être le plus addictif possible. Plus un individu passe de temps sur une application, plus il est possible de recueillir des données comportementales et d'en tirer profit. Cela s'appelle l'"économie de l'attention".

Avec suffisamment de recul il a été montré que l'exposition des enfants aux écrans est nuisible à leur développement moteur et cognitif.

Mais l'addiction aux écrans n'impacte pas que les enfants. En utilisant de plus en plus leurs outils numériques pour communiquer, les individus perdent le lien humain. On ne communique pas de la même façon au travers d'un écran qu'en face à face. Le dénigrement et l'insulte sont beaucoup plus aisés au travers d'une interface informatique que face à l'autre que l'on reconnaît comme un autre humain, même si on ne partage pas ses opinions.

Aujourd'hui les réseaux sociaux dominants favorisent la diffusion de fausses nouvelles, l'enfermement dans l'entre-soi et la conflictualité. Demain les progrès de l'"intelligence" articifielle vous rendre de plus en plus crédibles les fausses images, fausses vidéos et faux enregistrements audio (les deep fake). Distinguer le vrai du faux deviendra d'autant plus problématique que chacun est poussé à se replier sur soi et sur ses croyances (effet des "bulles de filtre" et de l'addiction).

De plus la massification et la rapidité qu'ils offrent démultiplie les actions malveillantes comme le cyberharcèlement ou les massacres de population.

Enfin se sachant surveillés en permanence les individus ont tendance à moins innover et à plus se conformer. C'est le refroidissement social expliqué sur ce site.

Ainsi, même si le but premier n'était que la course au profit, cette organisation du numérique entraîne une désintégration sociale et psychique.

Informez-vous à partir de sources sûres (journalisme d'investigation, travaux scientifiques). Faites connaître autour de vous ces mécanismes d'addiction et de manupulation. Allez vers des réseaux sociaux éthiques qui n'intègrent pas ces mécanismes (comme Mastodon, Mobilizon, PeerTube, etc.), amenez-y vos proches.

Pourtant les alternatives existent

Cette transformation en cours n'est pas inéluctable. Elle découle de la concentration capitalistique de quelques acteurs qui n'ont pris cette position hégémonique que parce qu'ils ont su attirer à eux des centaines de millions d'utilisateurs. Leur pouvoir n'existe que grâce à ces multitudes qui, non formées et non informées, se comportent comme des moutons.

Pourtant nous pouvons parfaitement nous passer d'eux. Car pour chaque service qu'ils proposent, il existe des alternatives libres, éthiques et souvent décentralisées. Ces outils ont été développés par des personnes soucieuses des libertés et de l'autonomie numérique. Ils ne vous espionnent pas, ne monétisent pas vos usages.

Les alternatives libres sont construites sur les principes de partage et de coopération qui sont au fondement des sociétés humaines. Le "capitalisme de surveillance" est construit sur la prédation.

Vous pouvez cesser de transférer votre pouvoir aux oligopoles manipulateurs, en choisissant simplement d'utiliser ces alternatives et de les promouvoir autour de vous.

Conclusion

Si l'activité industrielle et agrochimique détruit physiquement le vivant, le numérique tel qu'organisé par les entreprises hégémoniques détruit psychiquement les humains et leur organisation sociale.

De la même manière que seule une agriculture durable, sans pesticides ni herbicides de synthèse et sans engrais chimiques, peut mettre fin au génocide du vivant, seul un numérique durable et respectueux des valeurs humaines peut préserver la liberté humaine.

Dans notre page "pour une écologie du numérique", nous faisons des propositions à l'échelle des collectivités locales pour orienter vers un numérique au service de la population.


mise à jour : 06 avril 2024